L’analyse d’un spécialiste sur le but contre son camp imputé à Mandanda face à Bordeaux.
Lors de Bordeaux-Marseille, Mandanda marque un but contre son camp litigieux. Quel oeil un spécialiste porte t-il sur ce fait de jeu ?
Il y a cent pour-cent faute, selon moi. Chamakh ne touche le ballon à aucun moment. Son coup de tête touche le bras, ce qui empêche Mandanda de bloquer le ballon, et le bras le pousse dans le but. Si Chamakh avait touché la balle, et ensuite déséquilibré Mandanda sur la charge, il n’y aurait pas faute. L’attaquant ne commet pas de faute intentionnelle. Il ferme les yeux, et il empêche Mandanda, pendant qu’il est dans les airs, de jouer le ballon correctement. Il n’y a pas d’ambiguïté.
On a entendu des observateurs émettre des critiques sur l’intervention de Mandanda, à qui il est reproché de ne pas avoir su se protéger. Est-ce légitime ?
Sur un tel ballon, Mandanda ne peut pas mieux se protéger. Le ballon arrive latéralement. Quand le gardien l’attaque, il se retrouve face au ballon, mais pas face à Chamakh. Il faudrait donc qu’il prenne le ballon et qu’il se tourne en l’air, ou qu’il ouvre son genou. C’est absolument contraire à la technique à adopter pour saisir le ballon. C’était le rôle de l’arbitre de protéger le gardien. C’est facile de critiquer quand on regarde un match. Autant j’ai pu reconnaître que Mandanda avait été moins bien en certaines circonstances, autant sur cette action-là, il sort bien, il saute haut, il a les mains sur le ballon, et il n’est pas en position de se protéger. La tête de Chamakh doit être à vingt-cinq centimètres du ballon.
L’arbitre explique que Mandanda lui a laissé croire qu’il y avait faute de main en ne venant pas manifester sa désapprobation.
Mandanda explique bien que s’il était venu protester, il aurait été sanctionné. Arbitrer n’est pas facile. Nous, joueurs, nous nous trompons, les entraîneurs se trompent, tout le monde se trompe. L’arbitre aussi a le droit de se tromper. Mais demander à Mandanda de contester, c’est complètement contraire à l’esprit sportif, au fair-play, et au respect de l’arbitre. C’est remarquable que Mandanda ait gardé son calme. Sur une faute aussi grossière, c’est tellement difficile.
Tu as déjà vécu ce type de situation ?
Oui! Il y a deux saisons, à Moissy, face à Bayonne. Sur un corner, je viens chercher à peu près le même ballon aérien que Mandanda, et il m’arrive exactement la même chose. Le fait de sauter de côté m’empêche de me protéger par rapport à l’attaquant qui arrive de face. Je ne saute pas face au but adverse, je saute face au ballon qui vient d’un côté. Le joueur arrive sur mon côté, donc je ne peux pas me protéger. Dans mon cas, le joueur a tout mis : l’épaule et le coude. J’ai pris un coup de coude dans la mâchoire ou dans la tempe, je ne sais pas. Je suis tombé, et j’ai perdu connaissance. Je n’ai appris qu’à l’hôpital que nous avions perdu un à zéro sur cette action, alors que le joueur adverse n’avait pas touché le ballon. L’arbitre a validé le but et, moi, je suis sorti sur civière… L’adversaire avait été très correct, il m’avait appelé pour prendre de mes nouvelles. Quant à l’arbitre, je l’ai revu trois ou quatre mois après, et avant le match, il est venu me dire que ça faisait plaisir de me revoir sur un terrain.
Propos recueillis par Michaël Grossman