Heureusement, il n'y a pas que le football – ni les départementales – dans la vie. Au moins, pour ceux qui aspirent au calme, à la maîtrise de soi et des passions, à une égalité d'humeur qui n'enlève rien aux vertus de l'enthousiasme.
Il y a aussi la pêche, les timbres, le golf, les livres, la moto. Et il y a encore le football car, on a beau faire, tout nous y ramène. C'est notre côté phalène – attirés par la lumière de l'abat-jour et des stades. La victoire à Boulogne m'a de nouveau accéléré le palpitant. On n'en demandait pas tant, en tout cas pas moi. Trois points sur la côte d'Opale avec, à la clé, la place de premier ou de leader pour parler la langue de Miss Jenny qui inspira Jules Rimet, même si le premier du classement n'a pas une vocation de chef, n'a aucune raison de vouloir entraîner les autres à sa suite. Il est juste tout en haut de la liste, et il compte bien y rester.
Le moins qu'on puisse dire, selon la formule consacrée, c'est que le Red Star a plus que jamais son destin en mains ou entre les mains – ce qui au football, reconnaissons-le, demeure un joli paradoxe.
A peine le temps de nous remettre de nos émotions et le voyage à Bastia relance la petite mécanique du coeur. Cette fois-ci, c'est la Côte Orientale et c'est une nouvelle victoire, à croire que le Red Star est inspiré par la mer, par les bateaux de la Red Star Line, encore trois points, tandis que les rivaux immédiats piétinent. Alors je relis le classement, refais des calculs, des équations, des projections, je soupèse ces deux et trois points d'avance sur les suivants et toujours ce match en moins qui brille au firmament, j'évite d'extrapoler, j'applaudis la meilleure attaque et sinon la meilleure défense (car c'est l'apanage de Luçon) du moins un Planté étincelant.
Pour la circonstance, je me suis offert le compte-rendu de la rencontre dans Corse matin, qui s'est fait une place entre la nécrologie et les faits divers où être blessé à la tête par balles ne signifie pas avoir pris le ballon dans la tête. L'équipe bastiaise a donc pour surnom, venu dieu sait d'où, L'Escadron noir. Et l'article souligne a contrario les mérites du Red Star puisque l'Escadron en question a joué l'un de ses meilleurs matchs de la saison et vient de subir sa première défaite à domicile, sur le stade Erbajolo où il a reposé ses crampons après son passage en Ligue 2. Erbajolo voudrait dire « là où il y a de l'herbe »,de quoi donner à paître aux bêtes, jadis, car aujourd'hui la pelouse est synthétique. Ce qui explique que le Red Star se soit senti, un peu, chez lui.
Vendredi nous rencontrerons le Poiré-sur-Vie. Par curiosité, j'ai regardé sur une carte où situer ce nom très poétique. J'ai appris que Poiré venait de Pierre, que la Vie était un fleuve, que la commune se trouvait dans le département de la Vendée, à une trentaine de kilomètres de la mer, ou plutôt de l'océan, en tout cas de la Côte de Lumière. Et ça, c'est sûr, c'est bon pour la phalène. Même si, ce soir-là, nous recevrons.